Lettre ouverte de l’artiste Samaqani Cocachq au Ministre Bill Fraser

Le suivant est une lettre ouverte adressée au Ministre de Tourisme, Patrimoine et Culture Bill Fraser par l’artiste multidisciplinaire Samaqani Cocachq. L’opinion exprimée dans cette lettre n’engagent que l’auteure et ne reflètent pas nécessairement l’opinion du Conseil des arts du Nouveau-Brunswick. La lettre est présentée dans sa forme originale et n’a subi aucune révision par artsnb.

Cher Ministre Fraser,

Mon nom est Natalie Sappier; Samaqani Cocachq (l’esprit de l’eau) est mon nom Wolastoq. Je suis une artiste multidisciplinaire originaire de la Première Nation de Tobique, Nouveau-Brunswick. Depuis 14 ans, je travaille comme artiste professionnelle. Présentement je vie à Fredericton; néanmoins, je considère toute la province ma patrie. Je n’ai aucune intention de me déménager pour poursuivre ma pratique autre part; je m’ambitionne de voyager de temps en temps au but de partager mes histoires de notre terre et de notre culture, mais ma créativité vie ici. Ma patrie, le Nouveau-Brunswick, c’est l’endroit où j’apprends auprès de mes enseignants et de mon environnement. Je me situe sur la terre sainte de mes ancêtres; le don que je possède dans moi me permet de partager, à travers diverses formes artistiques, notre histoire, qui perdure et qui continue.

Natalie

Au cours des trois dernières années et à présent, je travaille en titre d’Agente de liaisons autochtones au Conseil des arts du Nouveau-Brunswick. L’expérience que j’ai vécu au cours de ces dernières quelques années me fut véritablement marquante. J’ai eu la chance non seulement de développer une relation familiale avec mes collègues, mais aussi d’agrandir mon réseau de connexions et d’amitiés en dehors des communautés de premières nations. Mon poste a été créé par le Cercle des Aînés, qui sert comme comité consultatif au conseil d’administration et au personnel d’artsnb. Ils collaborent avec le conseil et le personnel envers le développement de programmes et de services autodéterminés et adaptés aux particularités culturelles des personnes autochtones, visés aux personnes autochtones et livrés par une personne autochtone. Artsnb reconnait l’importance pour la province de notre culture et de notre patrimoine, ils savent qu’il nous est important de partager les histoires que nous tenons proche. Ils comprennent que nos relations mutuelles ont besoin de guérison, de compréhension et de connaissance. L’art nous offre plusieurs langages par lesquels nous pouvons rebâtir nos relations et se mettre sur la voie de réconciliation.

Pendant mon temps avec artsnb, nous avons voyagé à chacune des communautés de Premières Nations au Nouveau-Brunswick, créant des liens avec presque 300 artistes autochtones. Progressivement, le taux de demandes auprès de tous nos programmes de subvention parvenant d’artistes autochtones s’est élevé. La collaboration des uns avec les autres est en développement constant avec plusieurs projets aux niveaux provincial et national. Le taux d’étudiants autochtones se lançant dans les programmes d’éducation artistique est à la hausse aussi, ce démontrant une sensibilisation élevée quant aux occasions disponibles à eux. La participation à nos ateliers est aussi en croissance, et on demande constamment à notre personnel de visiter les communautés de Premières Nations pour des ateliers et des mentorats. Le fait que le monde peut nous visiter n’importe quand pour nous demander des conseils et développer un rapport personnel avec notre équipe, c’est unique à nous.

Les artistes autochtones sont prêts. Nous sommes prêts depuis toujours. La seule raison que nous sortons de nos communautés est qu’artsnb nous a construit un foyer. Le personnel continue à nous tendre la main et à partager des occasions uniques et des offres de mentorat. Avoir un agent(e) de liaisons autochtones de descendance Mik’maq/Wolastoq pour servir leur communauté, c’est important pour les artistes autochtones. Ils se sentent confortables parlant de leurs projets avec quelqu’un qui connait la culture, l’histoire et les difficultés qu’ils font face. Pendant ces ateliers, il m’était important d’emporter d’autres membres de l’équipe d’artsnb pour qu’ils puissent se rencontrer. Nous avons mêmes emporté des membres de ArtsLinkNB et de l’AAAPNB. Comme ce, ils ont l’occasion de voir que leur réseau de support, ça s’étend bien plus loin que moi. Aujourd’hui à artsnb, les artistes autochtones se sentiraient confortables de nous visiter et de discuter avec nos agents de programmes et notre directrice générale. Le nombre d’artistes autochtones qui viennent nous voir au bureau n’a jamais été plus élevé. C’est parce qu’ils reconnaissent qu’ici à artsnb, il y a toujours quelqu’un avec qui ils peuvent venir demander des conseils et discuter leurs projets et leur créativité. Ils savent qu’ils ont un foyer ici.

Cette coupure au budget d’artsnb, ce ne m’est non seulement frustrant, mais ce me fais triste. Nous avons travaillé tellement fort envers même la création du poste que je tiens, nous battant constamment pour le financement qui me permet de continuer mon travail. La création de ce poste à artsnb a catalysé un changement soudain, car en le créant nous avons envoyé un message : nous allons prendre le temps d’écouter aux artistes, de comprendre leurs besoins, et de leur aider à surmonter certains de leurs défis. Avec ce support, ils sont capables de faire des demandes pour le financement de leurs projets, et la plupart entre eux ont la confiance d’exécuter leurs projets et de partager cette créativité avec autrui. Pour moi, c’est un énorme changement, ayant grandi dans une communauté de Première Nation pour la majorité de ma vie. Nous sommes des conteurs émérites en plusieurs formes diverses : la narration orale, le chant, la danse, et le haut artisanat. L’art pour nous, c’est un moyen de subsistance. Nos enseignements sont enchâssés dans ces formes d’art, et en étant une personne autochtone de la famille Wolastoq, qui est sur le point de perdre son langage, ces formes d’art doivent être soutenues afin d’être préservées. Ces formes d’art tiennent notre langage et permettront aux générations futures d’apprendre leur patrimoine. Par notre art, nous préservons, nous propageons, et nous récréons à nouveau notre identité. Une approche centrée sur l’art est essentielle pour s’assurer que les racines des premières cultures de notre province tiennent fort.

Lors de notre réunion il y a quelques semaines, le département a parlé de soutien : de votre soutien des arts, de votre plan qui aidera davantage les arts. Je ne suis pas convaincu que ce plan fonctionnera, car avec une coupure de 400 000$ au budget d’artsnb, l’organisation qui a mis tellement d’effort envers l’inclusivité et à établir des liens entre cultures sera paralysé. Nos services de sensibilisation et d’établissement de relations en dehors des murs de notre bureau seront finis, et je crois que tout le travail qui a été accompli, dont cette province devrait se sentir bien fière, prendra un grand pas en arrière. La province discute avec zèle la vérité et la réconciliation. C’est une trajectoire qu’artsnb s’est déjà activement investi. Il y a un risque véritable en changeant la dynamique et les relations que ce travail voie un ralentissement, ou bien pire, qu’il sera perdu avec la longue liste de méfaits et de trahisons qui ont formé le narratif historique de la relation du gouvernement avec les Premières Nations. Dans le travail d’artsnb, nous arrivons finalement à bien faire les choses. Mais c’est fragile. Et pour moi, c’est déchirant. Je veux voir qu’on travaille l’un avec l’autre envers une relation même plus forte.

Cette coupe budgétaire, ce n’est pas la réponse. Lors de votre réunion avec les artistes, on parlait de trouver une solution. Maintenant, je crois qu’on doit discuter comment trouver une meilleure solution pour épargner de l’argent; autre que cette coupure énorme au budget d’artsnb. Je crois qu’on doit discuter comment trouver cette solution aussitôt que possible, pour qu’artsnb puisse continuer le travail important qu’on fait.  On doit être fiers de ce que nous faisons. Nous offrons du soutien aux formes d’expression artistique autochtones qui existent seulement ici dans l’Atlantique. Nous développons des ateliers et des rassemblements révolutionnaires. Et croyez-moi : le reste du monde est attentif à ce que nous faisons.  Les autres provinces s’inspirent de nous; ils nous rejoignent souvent pour en discuter. Gardons cette dynamique envers l’avant. Continuons à travailler ensemble pour le mieux de tout la province du Nouveau-Brunswick.

Woliwon,

Natalie Sappier/Samaqani Cocachq, l’Esprit de l’eau